Le courage n’est-il pas un élément un peu oublié du management ?
Lorsque nous parlons de Lean, nous faisons tous référence au Lean Management (et parfois au Lean Manufacturing)
Peut-être, devrions-nous plutôt inverser les termes et parler de Management Lean ?
Mais alors manager de façon Lean, qu’est-ce que cela veut dire ? Qu’est-ce que cela signifie concrètement, sur le Gemba (terrain) avec une vraie équipe, dans un vrai atelier ou un vrai bureau ?
Et puis … avant de Manager de manière Lean, ne faudrait-il tout simplement pas apprendre à manager ?
Que signifie Manager ?
Eh bien si l’on se réfère aux différents cours sur le management, il y a le management Directif, le management Participatif, le management Délégatif … bla, bla, bla, bla et pour finir “tout pareil que Gaston” … RRRZZZZZ, RRRZZZZZ, …
Vous l’aurez compris, ces cours sur le management me gonflent. Cela fait trente ans qu’il y a des cours sur le management dans toutes les écoles d’ingénieur, écoles de commerce et écoles de management …
Mais quels sont les résultats sur le terrain ?!!!
Je constate deux faits :
1) Nous sommes passés des managers paternalistes (les baby-boomers qui exerçaient dans les années 70 et 80) aux managers gestionnaires (les enfants des baby-boomers) plus occupés à gérer des indicateurs dans leur bureau qu’à “occuper le Gemba”
2) Qu’ils soient sortis de grandes écoles ou simplement montés dans la hiérarchie du fait de leurs compétences techniques, je trouve que généralement les managers d’aujourd’hui manquent singulièrement …
… de COUILLES !!!
Nota : Pardonnez-moi d’employer des gros mots dans ce blog, mais je souhaite un peu déroger aux discours ambiants un peu trop lisses et policés (voire politiquement corrects) que l’on trouve partout.
Mais que signifie “avoir des C……..” ?
Certains appellent ça le courage managérial, d’autres, le Leadership … c’est plus poli, mais cela ne nous dit pas ce que c’est.
Plusieurs grands hommes ont repris cette formule :
Le courage ce n’est pas “ne pas avoir peur”, le courage c’est d’y aller malgré la peur
Je partage ce point de vue. Toutefois, je voudrais apporter une nuance. Je constate qu’il y a deux formes de courage.
Le courage “Froid” et le courage “Chaud”
Si vous préférez, comprenez “le courage à froid” et “le courage à chaud”.
Ils sont bien différents. L’un n’est pas plus intense ou plus fort que l’autre. Leur différence est qu’ils ne se manifestent tout simplement pas au même moment.
Le courage chaud est celui qui vous fait accomplir des actes “héroïques” lors d’évènements graves. C’est aussi celui qui se manifeste sous le coup de la colère et vous fait “engueuler” les autres … et même votre patron.
Celui-ci ne m’intéresse pas. Il est alimenté par nos émotions. Tout le monde l’a expérimenté un jour ou l’autre à des degrés divers. Généralement, il provoque des actes plus ou moins incontrôlés, souvent immodérés et parfois préjudiciables.
Je préfère m’intéresser au courage “Froid” (ou à froid) qui nous manque tant pour manager (et je ne fais pas exception à la règle, rassurez-vous).
Anecdote
Il y a quelques années, mon gamin alors en CM2 invite des copains de classe pour son anniversaire. C’est la fin du mois de juin, il fait beau et chaud. Un des gamins que je nommerai Killian apporte des pistolets à eau. Tout ce petit monde s’amuse, s’arrose, court, se poursuit, etc.
À un moment, un autre gamin, Romain, casse malencontreusement un pistolet (merdouille en plastique Made in China). Il le balance discrètement dans un buisson, “ni vu ni connu”.
Deux heures après, Killian fait l’inventaire de ses pistolets à eau et constate qu’il en manque un. Évidemment, un autre gamin “très dévoué” (dans certains cas, j’appelle ça “le fayot fouteur de m….”) lui apporte le jouet manquant … cassé. Killian qui a vu Romain s’amuser avec, commence à l’interpeller. Le ton monte, jusqu’à ce que Killian traite Romain de “fils de p…” (oui, je sais, nous n’habitons pas Neuilly).
La bagarre éclate (super ambiance pour un anniversaire). Je les sépare immédiatement. Killian s’en va en faisant la tête.
Arrêtons-nous un instant sur le comportement de Romain.
Romain a fait preuve d’un certain courage chaud. Dans le cadre de la dispute et sous l’effet déclencheur “T’as traité ma mère de …” (qui lui a aussi bien servi d’excuse) il est allé à la baston. Il faut le reconnaitre; même si j’appelle cela de la bêtise, il fallait être courageux pour aller affronter Killian.
En revanche, fondamentalement, je trouve Romain lâche.
Le vrai courage n’aurait-il pas été d’aller voir son copain Killian en s’excusant d’avoir cassé par inadvertance son pistolet ?
Pour faire cela, il faut faire preuve d’un courage “Froid”.
Froid, parce que non sous l’emprise de l’émotion
Au quotidien les exemples ne manquent pas
Ce sont ces moments de lâcheté que nous éprouvons tous. Ils nous font renoncer à intervenir et/ou à interpeller autrui.
Ces moments sont catastrophiques par le message qu’ils propagent dans notre environnement, au sein de nos équipes.
On la “ferme” plus facilement face à “une grande gueule” et on “l’ouvre” plus aisément face au timide. Vous générez alors le sentiment d’injustice, du “deux poids, deux mesures”.
Au final, nous ne récoltons que démotivation et désinvestissement de nos gars.
C’est le même résultat que lorsque vous prenez une demi-mesure.
Alors, pourquoi cette attitude de renoncement ?
Tout simplement parce que nous avons peur d’affronter …
… le conflit !
Et bien souvent, nous avons peur, car nous ne savons pas …
… comment l’affronter ou le gérer !
Accepter de se confronter au risque de conflit, c’est apprendre à le gérer, à mieux le maitriser …
et bien souvent cela permet même d’éviter le conflit !!!
Souriez, il existe une solution 🙂 !
Vous allez me dire que le courage managérial ou le leadership, “on l’a” ou “on ne l’a pas”.
Je suis d’accord, mais en partie seulement.
Pour ma part, je pense que ce n’est pas qu’une question de tempérament.
Je suis convaincu que le courage “Froid” puise ses ressources dans la confiance. Confiance en soi, confiance dans son équipe.
Lorsqu’il y a confiance, on peut parler, dire les choses sans pour autant se sentir agressé ou attaqué au niveau personnel.
Dire à un collaborateur : “Je ne suis pas satisfait de la qualité de ton travail” ce n’est pas lui dire “Je trouve que tu es nul”
Le courage “Froid”, se travaille et se développe
Pour cela, deux conditions :
- Construire la confiance en ne critiquant pas la personne, mais son travail, son attitude, son comportement, ses dérives, etc. Ainsi, vous pouvez émettre une critique sans remettre en cause le respect que vous portez à personne.
- Argumenter sans chiffres, sans données, s’appelle un jugement. Or un jugement est perçu comme une opinion personnelle !
Appuyez-vous sur des faits ! Soyez factuels !
Chiffres à la clé, vous désamorcerez 50 % de la charge émotionnelle générée par la critique
(n’hésitez pas à relire l’article Speak with Data)
Et vous, plutôt “sang chaud” ou “capitaine de navire” ?