Le Lean est avant tout un
état d’esprit
S’il est difficile de définir ce qui est Lean, il est
nettement plus facile de définir ce qui ne l’est pas.
Le monde qui nous entoure regorge d’exemples qui ne sont
pas Lean et dont nous n’avons pas toujours conscience.
L’édition classique
Pas Lean !
Le monde de l’édition subit une profonde mutation depuis les années 70.
Selon les sources (voir l’étude : “Évolutions et impacts de l’édition en France”), entre 1970 et 2007, la production annuelle de titres (les nouveaux bouquins) a augmenté de 175 à 200 % !!!
De nos jours, ce sont environ 70 000 nouveaux titres qui sont publiés tous les ans !
Par ailleurs, sur la même période, l’évolution du tirage moyen de chaque titre n’a cessé de décroitre …
Ajouté à cela :
- la diversification des supports et biens culturels qui engendre une baisse des dépenses d’achat de livres (25% en 68, 14% en 2015)
- la financiarisation du monde de l’édition dans laquelle les parts de marchés sont aussi importantes que l’âme de l’éditeur. Concurrence effrénée oblige, il faut à tout prix “occuper la place” en inondant les librairies et points de vente avec un grand nombre de titres et un renouvellement (rotation des stocks) toujours plus rapide …
- l’émergence et la généralisation d’Internet (Amazon, …)
- l’autoédition par les auteurs qui décuple le nombre d’œuvres proposées
- la numérisation des œuvres déjà existantes qui crée des catalogues d’œuvres gigantesques
- la segmentation du lectorat, pour ne pas dire la personnalisation qui permet d’accéder à des domaines très pointus, très spécifiques, mais aussi très hétérogènes (vingt-cinq ans en arrière, il n’y avait aucun bouquin sur le Lean, aujourd’hui … )
Nous le voyons, tout cela génère une demande INFINIMENT variée pour des tirages qui deviennent toujours plus petits, nous évoluons vers un monde de …
… l’épicerie du livre
Or, le seul modèle disponible de production de “bouquins” était jusqu’à présent un modèle de production de masse (imprimerie).
Dans ce modèle, les éditeurs produisent en fonction de prévisions de ventes. Lorsque la prévision est correcte, les ventes sont en phases.
Une prévision trop faible et c’est la rupture; une prévision trop forte et c’est l’excès !
Or, pour cet univers devenu si concurrentiel, la rupture (des ventes manquées) n’est pas envisageable.
Au cas où …
… mieux vaut SURPRODUIRE !!!
Le résultat est là :
De 20 à 25% de la production est détruite
Chaque année, 142 millions de livres passent au pilon !!!
(Source : cet article de l’Obs de septembre 2017)
Le PILON !
La POD (Print On Demand)
Beaucoup plus Lean !!!
(l’impression “juste pour juste”)
Ci-dessus l’Espresso Book Machine.
Point besoin de faire un long discours.
Citons quelques avantages de l’impression à la demande :
- Plus de livre au pilon (142 millions de livres qui ne sont plus détruits!!! YES !). Cela induit moins d’encre polluante gaspillée, mais surtout moins d’arbres abattus pour fabriquer la pâte à papier de ces millions d’ouvrages !
- Accès au catalogue de l’éditeur qui possède “la machine magique”, mais surtout … aux 3 millions d’ouvrages appartenant au domaine public (France et international)!
- Plus besoin d’attendre des années qu’un éditeur réimprime un livre dont les stocks sont épuisés ! D’ailleurs, pour peu que la demande soit trop faible, ce n’est pas des années que vous risquez d’attendre, mais toute votre vie …
- Possibilité d’adapter l’impression du livre selon certains besoins (dyslexie, gros caractères, format voyage, livres bilingues, …).
- Possibilité de n’imprimer que quelques exemplaires ou petites séries. Cela permettra à de jeunes auteurs de s’autoproduire sans se ruiner ou devenir dépendants d’un éditeur. Cela permet de tester son marché, voir si son livre “marche”, dans l’esprit Lean Startup.
- La numérisation des ouvrages permet au libraire d’avoir “sous la main” un catalogue complet … dans un petit disque dur. Plus besoin de grand local, de présentoirs immenses et d’arrières boutiques bondées de livres (stocks de livres = argent immobilisé) … qui prennent la poussière !
- La numérisation des ouvrages permet et facilite le multi format (PDF, Epub, Kindle, …). Elle permet l’échange et les partenariats (Amazon Book Surge et l’université de Cornell (USA) ou la British Library et ses 65 000 titres).
- La numérisation des ouvrages permet et facilite la promotion et la vente sur Internet. Vous pouvez faire lire quelques pages du livre aux internautes pour les appâter. Vous pouvez, grâce au Web, toucher un public géographiquement éloigné (France, Monde). Certains sites l’ont bien compris et vous proposent l’impression d’un livre ou d’un texte pour une trentaine d’euros …
- Le prix que l’on pourrait croire nettement supérieur, ne l’est pas tant que ça. En effet, avec l’impression à la demande, il n’y a plus certains intermédiaires à rémunérer (stockage/logistique/transports) ni la destruction (qui n’est pas gratuite et que les éditeurs nous font payer). Les frais de marketing et de publicité portent sur les livres à succès (et aussi les “petits nouveaux” à promouvoir) mais sont moins dilués sur une étendue de titres au succès incertain.
- Etc., Etc., Etc.
Est-ce la fin de l’édition / impression classique ?
Comme en toute chose, rien n’est “ni tout blanc, ni tout noir”.
L’édition classique sera toujours performante pour les gros volumes, les “Blockbusters” comme disent les amerloques.
Tous les auteurs à succès (Guillaume Musso, Marc Lévy, Harlan Coben, …) et les lauréats de prix (Goncourt, Renaudot, Fémina, …) seront toujours imprimés en gros volumes, sur des presses (offset ou autres) dans des imprimeries.
Mais ces canaux de production seront complétés par une multitude de points d’impression à la demande (librairies, gares, aéroports).
Par cette révolution technologique, la production de livre dans le monde évolue d’un modèle de production de masse à un modèle de …
… personnalisation de masse !